Depuis près de deux ans, le tribunal judiciaire de Chaumont et l’Association Enquête et Médiation expérimentent un accompagnement renforcé destiné aux auteurs de violences intrafamiliales. Le bilan, dressé ce mardi 16 septembre, fait apparaître des résultats très encourageants.
Entretien avec Denis Devallois, procureur de la République :
Entretien avec Anthony Peleman, directeur général de l’AEM :
Mis en place fin 2023, le dispositif AIR VIF (Accompagnement Individualisé Renforcé) vise à prévenir la récidive des violences intrafamiliales en s’attaquant aux causes profondes des passages à l’acte : addictions, isolement social, difficultés d’emploi ou de logement. Il s’agit d’un dispositif pré-sentenciel unique en France, pensé comme une véritable alternative à l’incarcération.
Chaque personne concernée s’engage dans un contrat d’accompagnement encadré par un coach de l’AEM, qui assure un suivi quasi quotidien. Ce dernier élabore, en lien avec le parquet, un programme individualisé mobilisant un réseau de partenaires dans le domaine du soin, de l’hébergement, de l’emploi ou encore de la formation. L’objectif est double : redonner des repères et prévenir toute récidive.
Ce suivi intensif, d’une durée de six mois, reste exigeant : la confiance accordée repose sur une mise à l’épreuve stricte. En cas de non-respect des obligations, l’alternative peut être interrompue et le dossier revenir devant le juge.
Après près de deux ans d’expérimentation, 48 personnes ont intégré le dispositif, dont 36 suivis arrivés à leur terme. Le taux de réussite est particulièrement élevé : 84 % des participants ont connu une évolution positive, marquée par une réduction, voire une disparition des comportements addictifs, un retour vers l’emploi ou une stabilisation du logement. Les décisions judiciaires qui en ont découlé ont, dans de nombreux cas, remplacé une incarcération par des sursis probatoires, des sursis partiels ou des classements sous condition.
Au-delà des chiffres, le dispositif apparaît comme une « dernière main tendue » avant la prison, permettant à certains bénéficiaires de retrouver une stabilité et d’engager une véritable réinsertion. Les acteurs judiciaires et sociaux soulignent également que son coût reste bien inférieur à celui d’une incarcération.
À l’avenir, de nouveaux partenariats pourraient renforcer le maillage du programme, notamment avec les collectivités locales et les bailleurs sociaux. Car l’enjeu est aussi territorial : la réinsertion des bénéficiaires s’effectue dans leur bassin de vie, où la prévention des troubles de voisinage et des récidives est une priorité partagée.